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reconnaître personne. Une d'elles marche un peu en avant des autres : elles est petite. Je la prends d'abord pour une vieille. Elle m'appelle par mon nom : je la dévisage sous son capuchon : c'est la délicieuse Anaïs, la figure ravagée par la fatigue et par la douleur. Nous causons un peu à voix basse : elle me raconte la fin de sa sœur. Quelle fatalité tragique sur cette famille vraiment sœur de la mienne ! Mme Guyomarc'h est la Rachel biblique : elle a élevé onze enfants et voici en quatre ans, la quatrième qu'elle enterre.
Nous marchons côte à côte, Anaïs et moi. On va très vite, avec une sorte de hâte. Un seul prêtre précède le convoi ; et l'on chemine en silence : on n'entend que le bruit des souliers sur la route granitique séchée par le vent. Aux brèches des cours, sur les seuils des fermes des femmes, des hommes se montrent et s'agenouillent sur le passage du cortège. D'autres viennent s'y joindre. Des gens venus de Tréguier ou d'ailleurs nous attendent échelonnés le long de la route et le cortège va ainsi, toujours se grossissant, à chaque détour du chemin, entre les talus hérissés d'ajoncs ou plantés d'arbres. Puis c'est l'office à l'église et l'enterrement au cimetière. Le sacristain bêle un amen distrait