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Port-Blanc, 13 août, dimanche 1905

Pureté extraordinaire de la nuit. La lumière de la lune glisse délicieusement sur les choses. Le ciel et la mer de la même teinte élyséenne. Une barque sur le miroir des eaux, pêchant au chalut peut-être. Le cristal de l'air est si vibrant et le silence si profond qu'assis sur le mur de la terrasse j'entends tinter une horloge dans une des maisons du village. Les courlis se sifflent là-bas, vers Saint-Gildas. Les hautes pâquerettes, dans le parterre ont l'air de tendre leur calice vers une rosée invisible, manne mystérieuse de cette atmosphère enchantée. Une lanterne est apparue à l'extrémité de l'île aux Femmes : son reflet plongeait tout droit dans l'onde immobile. Le frisselis léger de la mer descendante. Les étoiles, très haut, d'un bleu plus pâle dans la soie bleutée de la nuit. Une beauté indicible, et un recueillement immense comme de toute la nature à genoux. Et cela se réfléchit en sérénité dans l'âme. C'est en vérité un dimanche mondial. Il plane du divin dans cette lumière sidérale venue comme de plus loin que les cieux habituels. Transparence, impondérabilité infinie de l'air. Attitude de piété des maisons endormies. Il coule du lait de partout, comme si les mamelles divines de Cybèle