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Dimanche matin. - 3 décembre 99.. Bott vient de me jeter des cailloux dans la croisée de ma chambre : « Poète, prends ta lyre ! » crie t-il. Quelle lyre pourrait rendre les surprenantes lueurs qui rayent le ciel dans l'Orient, au-dessus de la montagne de Locronan, par delà la Baie ? Ce sont des gerbes horizontales, de grandes teintes - ou plutôt obliques - qui semblent jaillir d'une source encore mystérieuse. Et il y a là des nuances adorables, mais inexprimables, toute une joaillerie en fusion qui coulerait de l'est vers le Nord-Est ; la Baie de Morgat là-dessous s'allume. - Et la plage où la mer qui baisse a laissé de son humidité brille comme de l'étain clair. J'écris ceci dans le jardin de Bott. Derrière moi, sur la hauteur cultivée, les glèbes semblent s'illuminer aussi, comme le ciel. un moulin à vent, aux vieilles toiles, semble agiter des ailes délicieusement roses. Le vent est un peu vif. Dans la route, des marins passent, qui me disent un « bonjour » et qui se rendent à la messe.

Aux grottes du Korrigan. - La grève semée de fin galet qui leur sert, en qque sorte, de parvis, s'appelle chez les gens du pays Porz-Tarz. Tarz, c'est la mauvaise mer. - Quand il y a de la tempête, me dit le petit Sénéchal qui ns accompagne, on dit : An Tarz zo braz.

Ce petit bonhomme, fort intéressant, ma foi, s'est joint à nous, selon la mode des gens d'ici, sans s'imposer, mais avec une sorte de discrétion tenace. il sont dans ce pays, tout un clan de Sénéchal. Il est du petit hameau sur la pente. Nous nous acheminons vers le château de Dinart ou plutôt vers le grand couloir souterrain dont j'ai oublié le nom : il perce la pointe de part en part, et c'est un miracle d'entendre le grand, le formidable bruit de conques suavages que rend la mer en pénétrant par les deux bouts dans cette espèce d'orgue de pierre. Toute cette terre est vaiement singulière et toute pleine de monstrueux enchantements ! -