Différences entre versions de « 4:47:3913 »
Ligne 8 : | Ligne 8 : | ||
pieds menus, pareilles à des dames. Il a même pris |
pieds menus, pareilles à des dames. Il a même pris |
||
des leçons de sculpture, un été qu'on travaillait dans |
des leçons de sculpture, un été qu'on travaillait dans |
||
− | les parages de Lanvellec |
+ | les parages de Lanvellec — où sont les imagiers bretons, |
les Mener. (Il faudra que cela lui serve pour sculpter |
les Mener. (Il faudra que cela lui serve pour sculpter |
||
à l'écart une image de la fille de Plouézec dont il |
à l'écart une image de la fille de Plouézec dont il |
||
− | deviendra éperdument amoureux). |
+ | deviendra éperdument amoureux). — Il vit beaucoup |
avec Samuel qui l'aime d'une amitié admirative, |
avec Samuel qui l'aime d'une amitié admirative, |
||
le considère un peu comme un être d'une autre |
le considère un peu comme un être d'une autre |
||
Ligne 20 : | Ligne 20 : | ||
La famille Kerangouez se compose, outre le |
La famille Kerangouez se compose, outre le |
||
− | fils, du père, Tual Kerangouez, un [ |
+ | fils, du père, Tual Kerangouez, un [colosse?] de bois, |
doux d'ailleurs, et un peu triste. Cette tristesse lui |
doux d'ailleurs, et un peu triste. Cette tristesse lui |
||
reste d'une histoire domestique qui lui est arrivée |
reste d'une histoire domestique qui lui est arrivée |
||
Ligne 30 : | Ligne 30 : | ||
fendu d'un coup de hache. C'était le temps où |
fendu d'un coup de hache. C'était le temps où |
||
les mœurs sabotières étaient encore toutes pénétrées |
les mœurs sabotières étaient encore toutes pénétrées |
||
− | de la barbarie primitive |
+ | de la barbarie primitive, aujourdhui fort |
adoucie. Jamais, le vieux Tual ne s'était consolé |
adoucie. Jamais, le vieux Tual ne s'était consolé |
||
de cette mort qu'il avait donnée. On disait que |
de cette mort qu'il avait donnée. On disait que |
Version du 16 novembre 2018 à 13:35
115 aussi tandis que Samuel reste creuseur, lui, il est chargé de donner au sabot la dernière main, puis on ne l'occupe qu'à la saboterie de luxe, aux mignons brodequins de bois, vrais chefs-d'œuvre de patience et d'art dont raffolent les filles de la côte, les patriciennes de la mer, les Paimpolaises aux pieds menus, pareilles à des dames. Il a même pris des leçons de sculpture, un été qu'on travaillait dans les parages de Lanvellec — où sont les imagiers bretons, les Mener. (Il faudra que cela lui serve pour sculpter à l'écart une image de la fille de Plouézec dont il deviendra éperdument amoureux). — Il vit beaucoup avec Samuel qui l'aime d'une amitié admirative, le considère un peu comme un être d'une autre essence, comme quelqu'un dont les Mener ont dit que si on le leur laissait, ils en feraient le plus célèbre imagier de saints qui se serait jamais vu en Bretagne.
La famille Kerangouez se compose, outre le fils, du père, Tual Kerangouez, un [colosse?] de bois, doux d'ailleurs, et un peu triste. Cette tristesse lui reste d'une histoire domestique qui lui est arrivée jadis, quand il s'agit pour lui d'épouser Madalen, sa femme. Celle-ci avait déjà donné sa parole à un autre. Les anciens chargés du rôle d'arbitre décidèrent une rencontre, le jugement de Dieu. Le compétiteur de Tual resta sur le carreau, le crâne fendu d'un coup de hache. C'était le temps où les mœurs sabotières étaient encore toutes pénétrées de la barbarie primitive, aujourdhui fort adoucie. Jamais, le vieux Tual ne s'était consolé de cette mort qu'il avait donnée. On disait que le dernier regard du cadavre l'avait toujours